Pourquoi j'ai des difficultés à m'endormir ?

Validé par le Dr Jean-François VISSEAUX
Médecin psychiatre, spécialiste du sommeil

Notre environnement

L’entrée dans le sommeil est une mécanique très élaborée, de haute précision. Mieux connaître son fonctionnement nous permet aujourd’hui d’indiquer précisément quels sont les phénomènes externes qui peuvent le perturber.

Etudiez bien les éléments dans la liste ci-dessous, si vous en reconnaissez un, soyez sûr que l’améliorer vous aidera peut-être plus que vous ne le croyez à rendre votre endormissement plus facile !

- La qualité de la literie

- La lumière, et plus particulièrement la lumière bleue des écrans, qui empêche la sécrétion de mélatonine ! (Télé, et surtout tablettes et smartphones, certains smartphones possèdent la capacité de diminuer la lumière bleue émise par l’écran, n’hésitez pas à regarder dans vos réglages !)

- Le silence (même le bruit le plus fin est gênant pour un sommeil de qualité)

- La température de la pièce (18 °C idéalement)

- L’humidité de la pièce (trop sec, l’air peut irriter vos voies respiratoires)

- L’alimentation (pas trop de viande le soir, pas plus d’un verre d’alcool)

- Les excitants (pas de café après 15H !)

- Le sport (pas d’activité intense après 19h)

Les perturbations physiologiques

Durant notre vie, notre heure d’endormissement varie beaucoup, et le sommeil change :

- Enfant, l’endormissement survient très tôt, pour permettre un sommeil suffisamment long (à 6 ans, on doit encore dormir au moins 10 heures par nuit)

- Adolescent, tout change. Bien qu’il soit indispensable pour la croissance et le développement cérébral de garder un sommeil de qualité, au moins 8 à 9 heures par nuit, on constate un bouleversement hormonal qui touche également l’horloge interne. Ainsi, la sécrétion de mélatonine, l’hormone du sommeil, survient plus tard, physiologiquement. Ne blâmez donc pas vos ados qui ne veulent plus s’endormir à 10H comme avant, c’est normal ! 

- Adulte, le volcan hormonal se calme, le sommeil devient plus régulier, avec un endormissement vers 23H00 à minuit, pour 7 à 8 heures de sommeil.

- Plus âgé, on voit inexorablement l’heure d’endormissement avancer, peut-être par un vieillissement progressif de notre horloge interne. Le plus important est de garder un sommeil assez long pour garder une bonne santé le plus longtemps possible…

La sécrétion de mélatonine

La mélatonine est l’hormone qui prépare au sommeil. Elle est sécrétée par notre cerveau, selon un rythme quotidien, par notre horloge interne (située également dans notre cerveau).

L’horloge interne joue un rôle essentiel : caler toute notre vie selon un rythme jour-nuit. Sous les ordres de notre horloge interne, la mélatonine est diffusée dans notre sang et notre cerveau, selon les moments de la journée.

- Au matin, pas de sécrétion : le corps s’éveille

- Peu après midi, pic de sécrétion, qui nous invite à la sieste (l’envie de faire la sieste est donc tout à fait physiologique, et la pratiquer est vivement recommandé – pas plus de 20 min)

- En fin d’après-midi, forte baisse de sécrétion

- En début de nuit, montée progressive et importante de sécrétion, jusqu’à 1heure du matin environ : elle permet de nous endormir, et de nous maintenir endormi toute la nuit.

- Et le même cycle recommence le lendemain, invariablement. 

Mais quelquefois, nos taux de mélatonine sont insuffisants : horaires de travail décalés, voyages trans-horaires, activité sportive ou intellectuelle trop importante en fin de journée, etc. Avec pour conséquence un endormissement difficile.

Cette mécanique très solide et très régulière a pour nom le rythme circadien. Cependant, elle n’est malheureusement pas tout à fait calée sur 24H, mais selon les individus, de 23H30 à 24H30, le plus souvent 24H15 environ. Nous disposons d’un régulateur externe extraordinaire : La lumière du jour ! En effet, la lumière a pour vertu de synchroniser tous les jours notre horloge interne sur 24H pile.

Magique ! Seulement chez certains d’entre nous, cela se dérègle, on appelle cela le retard de phase. Fréquent, il représente environ 10 % des insomnies. Des dérèglements de notre horloge interne en sont la cause. 

Favoriser le taux de mélatonine au coucher

Les solutions possibles pour favoriser votre taux de mélatonine

- Le matin, optez pour la luminothérapie afin de stimuler votre veille. Son action permet de raccourcir le cycle de votre horloge biologique pour une sécrétion de mélatonine plus précoce :Vous pourrez ainsi vous endormir plus tôt.

- Le soir, bannissez smartphones, tablettes, éclairages blancs, pour privilégier une petite ampoule jaune de faible intensité !

- Une cure de mélatonine de quelques semaines (souvent 3 à 4 semaines) peut aussi contribuer à restaurer un endormissement plus précoce

L'adénosine

Cette molécule est l’agent de la deuxième grande force qui régule notre sommeil : La pression de sommeil. Le principe est très simple, et vous l’avez tous expérimenté : plus on veille, plus on est fatigué, et plus on a envie de dormir. Et la progression est linéaire.

Après une nuit, la pression est à « 0 ». Plus on avance dans la journée, plus elle monte. Et si elle est assez haute, elle devient si forte que l’on s’endort.

L’agent de la pression de sommeil, c’est l’adénosine, une molécule qui « baigne » le cerveau, avec des taux de plus en plus élevés à mesure que l’on est en veille, et qui fait « basculer » notre cerveau de la veille vers le sommeil.

Cependant, des agents externes peuvent casser cette mécanique. Et notamment un ennemi sournois : la caféine. En effet, la molécule de caféine ressemble à s’y méprendre à l’adénosine. Elle se fixe à sa place sur les récepteurs des neurones responsables du sommeil, et l’empêche d’effectuer son travail. Voilà pourquoi le café maintient en éveil (ainsi que la théine dans une moindre mesure). Pendant que l’on reste éveillé sous l’effet du café, le taux d’adénosine continue à monter progressivement, pour finir par atteindre des taux très importants, le temps que le café s’élimine progressivement. 

Une fois le café éliminé, notre cerveau subit une véritable avalanche d’adénosine, et plonge rapidement dans un sommeil incontrôlable. Le grand danger, c’est sur la route.

Chaque année des centaines d’accidents mortels se produisent à cause de cela. Alors prudence !

Plutôt qu’une pause-café pour « tenir », privilégiez une petite sieste réparatrice qui va faire chuter votre taux d’adénosine !

L'activité sympathique et parasympathique 

Ce sont les 2 grands régulateurs de notre métabolisme, le « Yin » et le « Yang » de notre corps. 

L’activité sympathique accélère notre fréquence cardiaque, notre respiration, notre activité cérébrale, afin de pouvoir réagir vite et bien.

Que se passe-t-il concrètement ? 

Les hormones « sympathiques » (adrénaline, et noradrénaline dans le cerveau) sont sécrétées avec intensité pour nous maintenir dans un état de « veille intense », afin d’être capable de réagir rapidement et correctement. Si cela est très utile sur l’instant, en revanche une activité sympathique soutenue et trop constante devient une menace pour notre sommeil. Et c’est ce qui finit par nous arriver, à force de stress intenses et répétés.

La clef est de calmer l’activité sympathique, et de solliciter plutôt l’activité parasympathique, qui est son opposé. Elle va contribuer à diminuer la fréquence cardiaque, la pression artérielle, la température corporelle, et permettre l’endormissement. 

Favoriser l'activité parasympathique

LA SUGGESTION DE L'HYPNOSE :

Le stress subis dans la journée nous empêche de bien nous endormir. Des pensées négatives « remontent », qui entretiennent ce stress. 

La solution ? Évacuer doucement ces pensées négatives, et aller vers le lâcher-prise. En jouant sur nos sens, grâce à une voix, une musique douce, le toucher, on suggère au cerveau du calme, on stimule l’activité parasympathique, et on favorise l’endormissement.

JOUEZ SUR LA COHERENCE CARDIAQUE :

La cohérence cardiaque est une technique créée par des médecins, et basée sur le constat suivant : il y a un lien direct entre diminution du rythme respiratoire, de la fréquence cardiaque, et l’endormissement.

Son but est de diminuer le stress sympathique, et d’augmenter l’activité parasympathique. Tout est basé sur la régulation de la respiration :

- En allongeant chaque cycle respiratoire, la fréquence cardiaque commence doucement à diminuer, le sympathique se « calme », le parasympathique « prend l’ascendant », et le cerveau commence à être disposé à entrer dans le sommeil

OPTIMISEZ LA TEMPERATURE DE VOTRE CORPS :

Cela paraît surprenant et pourtant c’est essentiel :

- Pour s’endormir, la température corporelle doit descendre de 0.5 à 1 C°. C’est une des conséquences bénéfiques de la mise en route de notre activité parasympathique, comme nous l’avons vu plus haut. 

- Au cours de la nuit, la température continue à évoluer, pour remonter progressivement vers 37.2 °C au réveil.

Les désordres psychologiques

Le stress et l'anxiété

Sans que l’on s’en rende compte, le stress peut finir par enrayer la mécanique du sommeil. En effet, les mécanismes sous-tendus par l’anxiété sont les mêmes que ceux de l’éveil. On n’arrive plus à « débrancher ».

Il en est ainsi de « petits » stress accumulés au long des semaines et des mois, ou alors d’un évènement particulièrement stressant. Une boucle infernale peut s’enclencher, avec des nuits de mauvaise qualité, qui ne nous permettent pas de faire face la journée, avec un stress qui augmente encore, et une nuit compliquée derrière… 

Ceci crée un tableau d'anxiété anticipatoire relativement néfaste à l'endormissement.

Il existe de plus un lien bidirectionnel entre le sommeil et les troubles psychiatriques (syndrome dépressif en premier lieu), où l'on constate très fréquemment une fragmentation du sommeil associé à des insomnies de pleine nuit.

Retenez qu'un sommeil de bonne qualité est souvent le reflet d'un certain équilibre psychique, et inversement !

Tout mettre en oeuvre pour vous détendre au coucher

Les solutions possibles pour vous détendre au moment du coucher :

- Jouez sur la cohérence cardiaque : régulez votre respiration afin de diminuer votre rythme cardiaque, et diminuer votre stress

- Essayez une couverture lestée : la pression de celle-ci sur le corps procure un sentiment de bien être, voire de sécurité, vous permettant ainsi de vous détendre, de favoriser l'endormissement et le maintient dans le sommeil 

- L'option de l'aromathérapie : certaines huiles essentielles aident à procurer un sentiment de bien être, pour favoriser l'endormissement et améliorer la qualité du sommeil

Les habitudes du sommeil

Pour être régulier et de qualité, l’endormissement a besoin qu’on prenne « soin de lui ». Ainsi, rien de pire que de modifier les conditions d’endormissement et d’éveil en permanence – horaires, lieux… 

Répétés régulièrement, ces écarts peuvent être responsables de difficultés importantes d’endormissement.

Idem avec la notion de conditionnement. A penser qu’il y a des choses plus intéressantes à faire que dormir, on néglige les signes du sommeil (bâillements, baisse de concentration, frottement des yeux…), on maintient ses activités, et on envoie un message d’éveil au cerveau, qui s’adapte. Rien d’étonnant ensuite que l’on ne parvienne plus à s’endormir.

Pensez donc bien à vous écouter, à respecter votre corps, et à passer à des activités relaxantes, propices à l’endormissement, lorsque les signes apparaissent.

Testez les bienfaits de la Thérapie Comportementale et Cognitive (TCC)

Dans le cadre d'une insomnie isolée, il est actuellement recommandé de suivre une Thérapie Cognitivo-Comportementale. Derrière ce nom « complexe » se cache une prise en charge faite de bienveillance, d’écoute et de bon sens, qui vous aidera efficacement à retrouver un sommeil de qualité.

Thérapie non-médicamenteuse, elle est basée sur 2 principes :

- Travailler sur votre connaissance du sommeil, pour mieux éviter des écueils qui gêneraient son bon déroulement (c’est l’approche cognitive)

- Travailler sur votre comportement, pour diminuer tout ce qui peut altérer votre sommeil (stress, anxiété…), et favoriser au contraire un recentrage sur soi, une meilleure écoute du corps, et l’acceptation d’un lâcher-prise (c’est l’approche comportementale)

Faite de séances d’entretiens avec votre staff médical sur un programme de plusieurs semaines, cette thérapie consiste d’abord à étudier votre sommeil, votre environnement (chambre, métier, famille, pathologies associées…). On vous y explique également comment fonctionne le sommeil, puis on passe à la phase de traitement.

La TCC montre une efficacité supérieure aux médicaments, est sans effets secondaires, et efficace sur le long terme. C’est donc aujourd’hui le traitement de référence de l’insomnie. Si cela ne suffit pas, des solutions non-médicamenteuses éprouvées peuvent vous aider.

Les problèmes de santé et les médicaments

Certaines maladies perturbent l’endormissement :

- L’hyperthyroïdie, à l’occasion de laquelle l’activité sympathique est particulièrement stimulée. 

- L’apnée du sommeil favorise également une stimulation importante du système sympathique, induisant micro-éveils, hausse de la tension artérielle nocturne, envies d'aller aux toilettes la nuit...

De plus, certains médicaments peuvent contribuer à stimuler l’activité sympathique. L’endormissement est alors particulièrement difficile. Il n’est bien sûr pas question de les arrêter, mais suivez bien les recommandations de votre médecin. Ainsi, les corticoïdes, c’est le matin !

Des traitements anxiolytiques et antidépresseurs peuvent également jouer un rôle péjoratif sur l’endormissement. Enfin certains traitements somnifères peuvent être responsables, à terme, d’un « rebond d’insomnie ». Dans tous les cas, avant tout, parlez-en avec votre médecin. Au passage, il en est de même pour la plupart des drogues…

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